Pascal et Nadia aspirent l'un et l'autre à un autre mode de vie plus proche et respectueux de la nature. Alors, utopistes ou marginaux ?
Pascal arrive, en vélo, au rendez-vous. Il récuse le terme de « décroissant » et préfère celui de « simplicité volontaire ». Lassé de la surconsommation, surendetté, il a adopté une autre façon de vivre en quittant la ville avec femme et enfants. Aujourd'hui, il fait son compost, se chauffe avec sa cheminée, récupère l'eau de pluie pour arroser. Il rêverait de pouvoir se débrouiller par lui-même avec des énergies propres et « faites maison ». Mais comme il faut bien composer avec la réalité, il a l'électricité et Internet et utilise parfois l'avion pour aller voir sa belle-famille au Liban. Sa maison et son jardin – non traité, évidemment – s'apparentent à un immense laboratoire : il fabrique sa lessive avec de la cendre et construit ses propres meubles sans bois ! Non seulement cette pratique permet une utilisation judicieuse du recyclage, mais en plus, ainsi, Pascal participe à la lutte contre la destruction des forêts. En outre, Pascal s'est inscrit aussi sur une liste électorale. Certaines initiatives locales vont selon lui dans le bon sens, comme le combat de la mairie pour faire adopter la nourriture biologique dans les cantines scolaires.
Nadia, fonctionnaire, vit avec 1 400 euros par mois avec ses enfants et son mari, père au foyer, qui a abandonné un travail très bien rémunéré pour vivre plus en harmonie avec ses convictions. Ce seul salaire, c'est peu, mais elle et son époux ont beaucoup de temps libre en famille, ce qui est plus précieux que toutes les fortunes du monde, affirme-t-elle. Elle a sorti ses enfants du système scolaire, qui ne respecte pas les rythmes biologiques de l'enfant. Pas de marginalité pour autant : ils ont développé un riche réseau social dans ce monde alternatif, mêlant préoccupations écologiques, retour à la nature, mais aussi une vision apocalyptique d'un monde à la dérive. Sont-ils pour autant militants ? Pas forcément. Le plus important pour eux, c'est de respecter leur volonté individuelle de vivre en cohérence avec la terre et eux-mêmes.
Alors que dans les années 1970, cette tendance s'apparentait à la mouvance des babas cool, très caricaturés, ce mode de vie est aujourd'hui beaucoup mieux compris et accepté. Pourtant, certains ont tourné le dos à Pascal et Nadia, ne comprenant pas ce qui ressemble – pour eux – à un retour à l'âge de pierre.